Le Bon Sauveur dans la rue : "Cela faisait des lustres qu'on n'avait pas vu ça!"

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Date de l'évènement: 
Vendredi, 5 Juillet, 2013

Vendredi dernier (5 juillet 2013), c'était, comme tous les vendredis, jour de marché à Bégard. Mais vendredi dernier, c'était aussi, ...

... comme rarement, jour de revendications pour les personnels de l'hôpital du Bon Sauveur qui se sont retrouvés à 250-300 dans les allées du marché et dans les rues de la cité, conduits par Francis Urvoy pour la CFDT et Ronan Cornault pour la CGT. Dans le cortège, les slogans réclament la démission de la directrice et du responsable des ressources humaines. "Nous attendons de la Direction qu'elle se décide enfin à nous écouter, nous les salariés, qu'elle entende la situation de souffrance dans laquelle nous nous trouvons et qu'elle prenne en compte nos attentes en matière de qualité de vie au travail afin de préserver et d'optimiser notre qualité de vie personnelle" peut-on lire sur le tract rédigé conjointement par les deux syndicats. Venu à la rencontre du cortège stationné près de la mairie, le maire, Gérard Le Caër fait remarquer "Ca faisait des lustres qu'on n'avait pas vu cela!". Il a été sensible aux revendications exposées par les représentants du personnel : "Nous sommes inquiets du fonctionnement de la Fondation, de la suppression des lits demandés par l'ARS, de l'externalisation de certaines fonctions de l'établissement comme la blanchisserie et peut-être la cuisine". "Il faut recréer du dialogue social" dit le maire. "Oui, mais pour qu'il y ait dialogue, répond Francis Urvoy, il faut être deux". Sur ce point, les revendications dénoncent "une direction qui semble vouloir changer les conditions de travail (plannings, congés imposés, …) sans avoir, jusque-là, concerté  les institutions représentatives du personnel". Elles pointent par ailleurs "les entraves régulières qui empêchent le bon déroulement des instances" donnant pour preuves l'absence de diffusion de l'ordre du jour CE (Comité d'Entreprise ou d'Établissement) et l'absence de convocation NAO (Négociation Annuelle Obligatoire). "Nous dénonçons le stress au travail et le mal-être qui s'institue depuis que la nouvelle direction est présente, ce qui engendre des arrêts maladie et le départ de salariés de toutes catégories professionnelles. Nous dénonçons la pression exercée sur les cadres et non cadres, pour preuve l'augmentation des rappels à l'ordre et les avertissements…" peut-on lire aussi sur le tract de l'intersyndicale.

La direction argumente …

Consécutivement à cette manifestation, c'est au travers d'une conférence de presse que la directrice de l'établissement, Marie Gouyer, accompagnée d'Olivier Lazerges, responsable des ressources humaines et de Gilbert Le Blévennec, directeur des soins, a répondu à chacun des points soulevés par le personnel, par la voix de leurs représentants. "Nous évoluons dans un contexte particulièrement anxiogène qui fait le lit de toutes inquiétudes, présente Marie Gouyer en préambule, et le secteur de la santé n'y échappe pas. Les réformes, les restructurations se multiplient et se succèdent. La psychiatrie y était peu préparée et encore moins la Fondation Bon Sauveur. Ce climat me préoccupe et l'équipe de direction y est très attentive". Elle dresse ensuite un état des lieux social et budgétaire de l'établissement. Pour ce qui est du social, elle indique que les salaires n'ont pas été revalorisés depuis 10 ans, que la convention collective vient d'être modifiée et que les NAO n'ont pas eu lieu en 2012. Coté budgétaire, elle précise que pour la première fois de son histoire, la Fondation était déficitaire en 2012, qu'en 2013, le taux de revalorisation de la dotation annuelle de financement n'a pas été relevé, entrainant une réduction budgétaire de 3 à 3.5%. Confrontée à un besoin de renouvellement massif de l'effectif infirmier – 30 à 40% de l'effectif devrait partir en retraite à court terme – elle signale l'arrivée massive de nouveaux personnels. Elle pointe par ailleurs la difficulté de recruter des médecins sur Bégard. Sous la pression de l'ARS, organisme de tutelle de la Fondation, Marie Gouyer explique la mutation du métier de soignant, notamment liée à une exigence accrue de traçabilité qui demande aux soignants de passer d'une culture orale à une culture écrite et qui plus est à une culture écrite et numérique, ce qui tend à faire penser certains qu'ils s'éloignent de leur cœur de métier. "Je le concède, toutes ces évolutions créent du stress, des tensions pour les salariés de la Fondation, résume la directrice, aussi nous sommes-nous engagés dans une démarche d'accompagnement des nouveaux professionnels. Nous avons entrepris, avec l'accord du Conseil d'Administration, un énorme travail auquel ont été associés tous les salariés depuis un peu plus de 7 mois". Selon elle, face au besoin de devoir optimiser les processus, il est nécessaire de changer les habitudes, de convaincre du bien-fondé de la démarche, de s'inscrire dans une nouvelle culture, mais dit-elle, "la démarche participative initiée dès novembre 2012 s'est révélée constructive et les résultats sont au rendez-vous puisque la fin de l'exercice 2013 se profile en équilibre, sans perte d'emploi malgré un budget réduit de 3%".

Quant aux revendications des syndicats concernant l'absence d'information lors des Conseils d'Administration, le directrice précise qu'il ne s'agit pas d'un refus de communiquer mais d'une méconnaissance de sa part des traditions en la matière, lesquelles consistent non pas à rédiger un PV du Conseil mais à produire une synthèse des décisions prises et à la diffuser sur l'intranet de l'établissement. "C'est vrai que cela n'a pas été fait, car nous ne savions pas que nous devions le faire. C'est un loupé!". Quant aux inquiétudes des salariés vis-à-vis de l'externalisation, la directrice précise : "Il n'y a pas de politique d'externalisation. Seule la blanchisserie a été confiée à une entreprise en sous-traitance pour une raison majeure : tout notre matériel était obsolète et cela nous engageait sur un investissement de 800.000 à 1 million d'euros; De plus, le bâtiment n'était plus aux normes. Et ce n'était pas un projet récent! Lorsque je suis entrée en fonction, un audit avait déjà été fait et il restait à se positionner. C'est ce que l'on a fait, en accord avec le CA et dans les règles vis à vis du CE qui a voté à l'unanimité. Il n'y a eu aucun licenciement. Il y a eu neuf reclassements au sein de La Fondation". Et l'externalisation de la cuisine? "C'est un bruit que l'on se plait à entretenir répond Marie Gouyer. "J'ai fait appel à la Sodexo car le chef cuisinier est tombé malade. Je leur ai confié l'organisation de la cuisine, le plan de maîtrise sanitaire et le plan d'achat. Il n'est pas question d'externaliser la cuisine car là, on a un bel outil de travail. On a juste fait appel à une prestation de service du fait de l'absence de notre chef de cuisine". Quant aux plannings, aux congés imposés, le responsable des ressources humaine explique : "Nous avons projeté de réorganiser l'administration paie et planification. On s'est aperçu qu'un planning existait dans notre logiciel et qu'il n'était pas utilisé. Nous avons voulu faciliter le travail des cadres de proximité qui consacrait beaucoup de temps à la gestion des plannings et leur rendre leur cœur de métier. Des groupes de travail pluridisciplinaires ont été créés, une cinquantaine de salariés ont été mobilisés, toutes catégories, y compris des partenaires sociaux et des élus. Il y a eu des comptes-rendus qui identifiaient toutes les possibilités d'une meilleure organisation tant pour le confort des salariés que pour celui des patients. Nous devions aussi nous mettre en conformité avec le droit du travail pour les temps de repos, ce qui n'était pas respecté jusqu'ici. Maintenant, dire que l'on impose les congés, que l'on ne va pas pouvoir prendre ses RTT, ce n'est pas du tout dans l'esprit de ces groupes de travail. Ce que l'on souhaite, c'est planifier beaucoup plus à l'avance, pour mieux organiser les équipes et nous mettre en conformité avec la réglementation en matière de récupération, de temps de repos… et cela ne reste que partiel, et rien n'est encore acté. Cela se fera vers octobre avec les instances représentatives, les représentants des personnels ne semblant désireux de le faire dans cette période estivale".

Un malentendu alors? Sans doute pas si simple, mais incontestablement, et Marie Gouyer le reconnaîtra, "il nous faut encore plus et mieux communiquer". Ce fut d'ailleurs la requête expresse formulée par le maire de Bégard, président du Conseil de surveillance de la Fondation, qui a tenu à faire paraître, le soir même le communiqué ci-dessous.

Communiqué du Maire

«Ce vendredi matin 5 juillet, plus de 200 salariés de la Fondation du Bon Sauveur ont défilé dans les rues de la ville. Je me suis entretenu avec les responsables syndicaux, mais aussi avec des personnes, dont René qui m’a dit : "Ce n’est pas dans mon habitude de manifester et si tu me vois là, c’est qu’il se passe quelque chose de grave à l’hôpital…".

A l’instant où je rédige ces lignes, Madame la Directrice de l’hôpital n’a pas jugé utile de me contacter, c’est vrai que je ne siège pas au conseil d’administration, mais en tant que Président du conseil de surveillance de la fondation et surtout en tant que Maire de Bégard, soucieux de l’avenir de l’hôpital, de ses employés et de ses patients, je ne peux pas rester en dehors de ce débat, débat légitime où le dialogue social doit s’instaurer, où les uns et les autres doivent être entendus, respectés et considérés.

On a tout à gagner, ENSEMBLE.

Gérard LE CAËR - Maire de Bégard - Vice-président du Conseil Général des Côtes d’Armor»

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