Hôpital Bon Sauveur : Des "Histoires sur Mesures" pleines d'émotion et de poésie

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Date de l'évènement: 
Vendredi, 2 Septembre, 2016

Vendredi 2 septembre (2016), le couloir d'accès aux salles culturelles de la fondation du Bon Sauveur avait une allure de musée ethnologique consacré aux indiens d'Amérique. Neuf totems ou plus précisément neuf bâtons de paroles, de ceux que les indiens se passaient lors de leurs cérémonies, de leur rituel sacré,...

...  tous de taille et d'enjolivures différents, tous chargés de significations, tous porteurs d'une vie. Ils ont été réalisés par sept patients et deux accompagnants, une aide-soignante et Cynthia Guyot, bénévole de l'association La Fourmi-e et qui était déjà intervenue auprès de la Fondation pour le TricotTag 2015 exposé lors de la journée du Patrimoine de l'an passé.

A l'initiative de ce projet intitulé "Histoires sur mesures", Aurelie Besenval, Directrice artistique de l'association La Fourmi-e. Elle a fait appel à Viviane Rabaud, artiste plasticienne résidant en Bretagne. "L'idée c'est que les patients participent à leur propre portrait, explique cette dernière ; On leur a donc donné un tasseau coupé à leur taille – il est La personne - et ce tasseau, ils ont commencé à le sculpter, le poncer, le percer, le pyrograver et à ajouter de la matière, des objets, des matériaux, des symboles pour se raconter". Ce projet, ce travail, est original et inédit. "L'idée du bâton m'est venue lors de ma visite de Bon Sauveur que je ne connaissais pas, explique Viviane Rabaud. C'est un grand lieu, il y a beaucoup de personnes qui y travaillent… cela traite de l'homme, de l'humain… on est dans le soin, beaucoup dans la parole et ce lieu est dispersé, avec des pôles à l'extérieur, des gens qui vont et qui viennent… et du coup j'ai pensé au bâton de parole, ou le bâton de mémoire, voire le bâton de pèlerin eu égard à l'histoire religieuse du site".

Des vies racontées en quelques mots…

Mais la galerie des bâtons n'est pas tout ! Loin de là. Sur les murs de la salle culturelle proprement dite, l'artiste a exposé neuf photos monochromes de format A2 ; On y voit le portrait en plein de chacun des participants tenant fièrement son bâton. C'est son bâton de parole, il a la parole et il se raconte : ses goûts, ses passions, ce qui le fait vibrer, le pouvoir qu'il aimerait que son bâton ait s'il était magique, où il aimerait se poser pour regarder le monde… et toutes ces évocations sont proposées à côté de chacun des portraits. C'est leur Histoire, leurs histoires, les histoires d'accidentés de la vie. C'est surprenant de philosophie comme ce "Je ne veux pas être roi, mais j'essaye au moins d'être droit" ; Surprenant de poésie comme celle-ci qui dit : "J'aimerais bien me poser devant la mer et regarder l'infini avec des arbres derrière moi pour être protégée. Je regarderais le bout, au loin". Surprenant d'attente et d'humanisme : "J'aimerais que mon bâton ait le pouvoir de me trouver une compagne. Parce que la solitude, c'est long. J'aimerais que mon bâton puisse aider les gens, les mettre dans le droit chemin s'ils déconnent, qu'il leur permette d'aller bien". Surprenant d'espoir : "Le pouvoir magique de mon bâton serait qu'il me sorte d'ici et que je reprenne ma place dans mon boulot. Pour le monde, ce serait d'arrêter tout ce qui est terrorisme en général et tout ce qui est fanatisme" ou encore surprenant de simplicité comme ce patient qui dit :"Les moments que je préfère, c'est quand je gagne aux jeux, au tiercé. C'est le seul jeu d'argent auquel je joue. Je suis un joueur de tiercé, mais je ne suis pas le joueur classique ; Le joueur classique, il va chercher dans le journal ; Moi je joue au pif" et qui ajoute dans une deuxième tablette : "Je m'assiérais au bord de l'eau de mer plutôt que de l'eau de rivière parce que ça bouge plus et autour de moi, il y aurait des nanas et plein de choses ; ça bougerait ; Avec un PMU pas trop loin pour jouer au tiercé. Il y aurait mon chien Teddy".

Les animateurs du projet se disent pleinement satisfaits. "Pour moi, confie Viviane Rabaud, ils étaient neuf au départ et neuf à l'arrivée ; Donc ce n'est déjà pas mal. Ils étaient très investis, pour certains ce fut émouvant ; Beaucoup de sérieux, beaucoup d'humour, sur 10 ateliers un mardi sur deux, l'après-midi, pendant 2h, de mi-février à juin, j'ai pris plaisir à venir travailler avec ces personnes-là".

Pour Anne Tesnière, référente du pôle Socio-Thérapeutique et Culturel (STC), "ces bâtons sont l'expression de l'histoire de chacun, leur Histoire avec un grand H et ils en laissent une trace sous la forme d'une œuvre". Elle confirme que ce travail s'est fait dans la bonne humeur, le partage, l'entre-aide, le plaisir d'être ensemble et la création. "Ils ont exprimé le sentiment d'être très fiers de ce qu'ils ont fait. Cela les a touchés d'exprimer leur histoire personnelle".

Le Directeur de la Fondation, Pascal Conan, remercie ensuite la Direction Départemental des Affaires Culturelles qui a, en partie, financé cette opération. Les autres partenaires ont été la Fondation elle-même (2.000€) et l'association InPACTS qui est intervenue en qualité de mécène (NDLR : http://inpact-culture.org/). "Le sens de tout cela, a t'il ajouté, c'est pour les patients, une participation à l'action du soin. Cela crée du lien avec les aide-soignants" et de poursuivre : "la fondation s'associe à la dimension culturelle dans les établissements de santé et médico-sociaux. C'est une dimension importante car nos patients ne sont pas alités comme dans les autres hôpitaux ; Ils s'occupent dans la journée et ce qui est reproché aux établissements, c'est qu'ils sont désœuvrés". Il note que La Fondation, avec son pôle STC, fait un effort particulièrement important pour lutter contre ce désœuvrement. "La Fondation veut aussi donner une image plus moderne, plus ouverte. La culture peut y entrer et la culture doit en sortir aussi. Dans le projet d'établissement en cours de rédaction pour les cinq ans à venir, il y aura un volet culturel – c'est un peu inhabituel, tous les établissements n'ont pas ce genre de projet – et dans ce projet, toutes les actions telles que celle-ci seront poursuivies".

Très sincèrement, ne ratez pas cette exposition pleine d'émotion qui sera visible dans les salles culturelles du Centre Hospitalier lors de journée du patrimoine (Dimanche 18 septembre) ainsi que chaque vendredi de 14h00 à 16h30 du 23 septembre au 28 octobre. Pour les visites de groupes, se renseigner au 02.96.45.38.66.

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